Réduire l'utilisation des plastiques à usage unique : comment cinq entreprises innovantes relèvent ce défi
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Nous promouvons et accompagnons les entreprises alimentaires qui proposent des solutions innovantes sans emballage plastique à usage unique, en collaboration avec nos partenaires du secteur de la restauration
Treize entreprises proposant des solutions d'emballage rechargeables et réutilisables innovantes ont relevé le Single-Use Plastics Challenge de Google. Le but : mettre en relation les utilisateurs et les fournisseurs d'autres solutions de conditionnement, pour le bien de toute l'industrie alimentaire. Neuf ont été choisies pour collaborer avec des acteurs majeurs du secteur de la restauration, tels que Canteen, Compass Group et Guckenheimer, et pour tester leurs produits dans les cafés et microcuisines de Google aux États-Unis. Qu'il s'agisse de sachets pour collation réutilisables, de couverts comestibles, de récipients pour huile de cuisson rechargeables ou de systèmes de distribution de nourriture en vrac basés sur les données, les innovations proposées par les finalistes remettent en question un système qui repose en grande partie sur le modèle bon marché du plastique à usage unique. Voici l'histoire de cinq de ces entreprises.
Quand une tradition millénaire s'invite dans un café moderne
Il y a une quinzaine d'années, lors d'un voyage en Inde, Sanjeev Mankotia fut surpris de constater que les vendeurs ambulants servaient du thé à emporter dans des tasses en argile faites à la main. Ces tasses, appelées "kulhar", sont habituellement écrasées par terre une fois le thé terminé et retournent ainsi à l'état de poussière. Sanjeev Mankotia a toujours gardé cette idée en tête. En 2019, il a commencé à travailler sur GaeaStar, une entreprise basée à San Francisco et à Berlin, qui s'inspire de cette tradition millénaire pour proposer aux cafés d'Europe et des États-Unis des tasses en argile imprimées en 3D, de l'épaisseur d'une coquille d'œuf.
"Les tasses en plastique et en papier proposées aujourd'hui dans le cadre de la vente à emporter exigent énormément de ressources et de traitement pour seulement 15 minutes d'utilisation. Nous devons simplement fournir de meilleures solutions pour résoudre le problème de la pollution", explique Sanjeev Mankotia, ajoutant que chaque année, environ 500 milliards de tasses à usage unique sont utilisées dans le monde. Ces tasses finissent généralement dans des décharges et figurent dans le top 10 des déchets qui polluent les plages du globe.
Selon Sanjeev Mankotia, les tasses lavables et réutilisables de GaeaStar connaissent une forte demande, ce qui montre que les gens aspirent à une solution durable pour remplacer le plastique. L'entreprise indique également qu'elle étudie actuellement un modèle de bout en bout relatif au cycle de vie des déchets, en collaboration avec la ville de Zurich et un café local.
"Pour qu'une solution soit adoptée par les consommateurs, il est essentiel qu'elle offre une expérience plus agréable, tout en restant aussi pratique", explique Sanjeev Mankotia.
Il ajoute que le défi Google a permis à GaeaStar de mieux comprendre le fonctionnement de la restauration en entreprise à grande échelle et de nouer des contacts utiles avec des sociétés de services de restauration.
Penser aux générations futures
"Après avoir épuisé les ressources de notre réseau de fournisseurs de services de restauration à la recherche de solutions sans plastique, nous tenions à explorer des approches plus créatives. Jusqu'à présent, le Single-Use Plastics Challenge a été une formidable source d'inspiration, et j'ai vraiment hâte de voir ces solutions passer à la phase suivante", nous confie Mike Werner, responsable des programmes de développement durable et de l'innovation chez Google, et l'un des responsables exécutifs du défi.
Ce défi s'inscrit dans le cadre d'un programme d'économie circulaire plus large, qui adopte la règle des 4 R (refuser, réutiliser, réduire et recycler). Cette règle vise à réduire les impacts environnementaux en réutilisant au maximum les ressources non renouvelables, et en supprimant les déchets et la pollution dès la phase de conception. En adoptant des processus et des produits réutilisables et sans plastique dans ses cafés et ses cuisines, Google apporte sa pierre à l'édifice afin de réduire la pollution plastique.
Pour Kate et Bryan Flynn, le couple qui a fondé la marque californienne de produits alimentaires sains Sun & Swell, relever le défi de Google est devenu une évidence lorsqu'ils ont reçu leur première palette d'emballages personnalisés entourée de film plastique, en 2019. Le couple attendait à l'époque son premier enfant, et il est apparu évident qu'un changement était nécessaire.
"Je pense que c'est à ce moment-là que nous avons réellement pris conscience de ce que 'penser aux générations futures' voulait dire. Je ne sais pas si nous aurions pris la même décision si je n'avais pas été enceinte. La question de savoir quel héritage nous comptions laisser derrière nous a pesé considérablement dans notre décision d'abandonner le plastique", confie Kate Flynn, visiblement émue.
Sun & Swell vend à présent ses collations et aliments de base dans des emballages compostables fabriqués à partir de papier et de films à base de soja ou de maïs. Afin de participer au Single-Use Plastics Challenge, l'entreprise a testé un emballage réutilisable pour quelques-unes de ses collations. Elle vend directement ses produits aux bureaux d'entreprise, hôtels, stades et traiteurs qui disposent de leurs propres installations de compostage, et propose un programme de renvoi des sachets compostables aux particuliers qui n'ont pas accès à un bac à compost. Selon Sun & Swell, ces efforts ont permis d'éviter d'utiliser quelque 850 000 sacs en plastique à ce jour.
"Nous avons très vite compris que le fonctionnement du système alimentaire traditionnel n'était pas compatible avec des emballages réutilisables. Il s'articule autour de la culture du plastique à usage unique, ce qui a de nombreuses implications sur les produits, la chaîne d'approvisionnement et la distribution", nous explique Kate Flynn.
Le plastique jetable représente l'essentiel des 6,3 milliards de tonnes de déchets plastiques qui polluent notre planète. Un chiffre vertigineux qui, selon les prévisions, devrait quasiment doubler d'ici 2050. Seulement 9 % des déchets plastiques sont recyclés. La majorité de ces déchets s'entassent dans des décharges où il leur faut jusqu'à 500 ans pour se décomposer, ou sont emportés dans les océans où ils nuisent aux oiseaux et à la faune marine.
L'importance de sensibiliser le public
C'est aussi en pensant à l'avenir de ses enfants que Dinesh Tadepalli, cofondateur d'Incredible Eats a décidé de plancher sur le concept des couverts comestibles. L'idée lui est venue en 2018, à la vue du sac poubelle débordant de cuillères en plastique d'un glacier californien. Rien qu'aux États-Unis, 100 millions de couverts en plastique sont utilisés chaque jour. La majorité d'entre eux finissent dans des décharges.
Après avoir passé environ huit mois à essayer différents mélanges et moules, Dinesh Tadepalli a mis au point ses premières cuillères comestibles faites maison à base de blé, d'avoine, de maïs, de pois chiches et de riz brun. Il a ensuite vendu la maison familiale pour investir la somme dans une usine en Inde. Depuis, Incredible Eats a ajouté à sa gamme de produits comestibles des pailles et des fourchettes disponibles dans différentes saveurs. Ses produits gardent leur forme pendant 30 minutes dans une soupe chaude ou un dessert glacé. À ce jour, l'entreprise déclare que ses articles comestibles ont remplacé quelque sept millions de couverts en plastique.
Dinesh Tadepalli cherche de plus en plus à vendre ses produits aux professionnels de l'industrie alimentaire et de la restauration rapide. Il explique que le rayonnement de Google et ses contacts avec les grands fournisseurs du secteur ont joué un rôle essentiel pour faire connaître Incredible Eats.
"Je suis conscient qu'il est difficile de demander aux grandes entreprises alimentaires de remplacer tous leurs couverts en plastique par nos versions comestibles. Mais s'il est une chose dont je suis sûr, c'est que les clients choisiront une cuillère comestible si on ajoute cette option au menu. Sensibiliser les consommateurs à cette problématique est essentiel", conclut-il.
Un retour d'informations très utile et une collaboration interentreprises
Pour bon nombre d'entreprises, avoir la possibilité de tester des produits dans les cafés et microcuisines de Google permet également d'obtenir de précieuses informations. Jennifer Look-Hong et Geoffrey MacKay, respectivement Chief Executive Officer et Chief Operating Officer de The Aggressive Good (TAG), expliquent que leur collaboration avec Google leur a ouvert les yeux sur le large éventail d'applications possibles pour leur système BMS (Bulk Management System).
Basée à Ottawa, au Canada, la société TAG a développé son premier prototype de système de distribution en vrac basé sur les données en 2020. TAG permet aux consommateurs de contrôler précisément le prix et le poids des marchandises achetées au moyen d'un écran numérique, en les dispensant de peser chaque article individuellement. Un système d'analyse de données effectue le suivi des stocks pour optimiser la fraîcheur des produits et réduire le gaspillage alimentaire.
"Notre objectif est de permettre aux consommateurs et aux entreprises de changer facilement leurs habitudes. Ce n'est pas parce que vous avez toujours fait comme ça que c'est nécessairement la meilleure façon de procéder", explique Geoffrey MacKay.
À l'origine, TAG ciblait principalement les épiceries. Cependant, au fil du temps, l'équipe a réorienté sa stratégie de vente vers les bureaux d'entreprise, les centres de traitement et les hôtels dans le but de réduire les déchets. L'entreprise a enregistré une demande croissante de clients issus de pays lointains comme la Nouvelle-Zélande.
Le défi Google a également favorisé la collaboration interentreprises. TAG projette ainsi de présenter les tasses en argile imprimées en 3D de GaeaStar à ses hôtels partenaires pour qu'elles soient utilisées avec son système de distribution en vrac.
Coup de projecteur sur l'arrière-cuisine
Bon nombre des participants au Single-Use Plastics Challenge proposent des produits destinés au grand public. L'entreprise californienne Eco Refill Systems se consacre, quant à elle, à l'élimination de grandes quantités de déchets plastiques dont l'utilisateur final ne soupçonne même pas l'existence. Forte de 25 ans d'expérience dans le secteur de l'importation et de la distribution d'huile de cuisson, Bernadette Sarouli, CEO d'Eco Refill Systems, sait mieux que quiconque à quel point les cuisines commerciales sont dépendantes des récipients en plastique. Cependant, ces récipients ne peuvent pas être recyclés en raison de la contamination par l'huile.
Bernadette Sarouli et son équipe ont vite compris que des récipients réutilisables en acier inoxydable constituaient la solution au problème. Mais trouver le partenaire idéal pour fabriquer ce type de produit allait s'avérer très difficile… Après bien des recherches, Eco Refill Systems a déniché une entreprise italienne capable de fabriquer sur mesure un récipient pourvu d'un robinet, d'une ouverture pour le remplissage, et d'un purgeur d'air pour qu'il soit possible de libérer la pression et d'augmenter ou de réduire le débit d'huile.
Ces "beaux Italiens", ainsi que l'entreprise a surnommé ses récipients métalliques, sont aujourd'hui utilisés dans des restaurants, des cuisines d'entreprise et des sociétés de restauration en Californie et au Nebraska.
Chaque récipient de 10 et 50 litres d'Eco Refill Systems remplace désormais 3 ou 12 bidons en plastique de 3,8 litres utilisés généralement dans les cuisines. L'entreprise estime que, depuis sa création en 2015, elle a permis d'éviter une quantité de déchets plastiques équivalant au poids de 89 voitures particulières.
"Beaucoup de gens ne sont pas conscients de la quantité de déchets produits en cuisine. Dans le cas des grandes entreprises, l'impact de ces déchets augmente très rapidement à un rythme exponentiel", explique Bernadette Sarouli, ajoutant que le défi Google permettrait à Eco Refill Systems d'élargir considérablement la portée de son activité.
Le changement est possible
Pour les entreprises qui participent au défi Google, il est essentiel de sensibiliser le public à la problématique du plastique à usage unique. Le changement est possible ! Nous en sommes convaincus au vu du nombre croissant de bureaux d'entreprise, de sociétés de restauration, d'universités, d'hôtels, de stades et de restaurants qui choisissent de remplacer le plastique à usage unique.
"Nous savons parfaitement qu'il est impossible d'imposer quelque chose de nouveau en utilisant un système archaïque. Nous avons besoin de plus de partenaires comme Google pour comprendre à quoi pourrait ressembler un nouveau système", explique Kate Flynn de Sun & Swell.